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Transports

Novatrans au bord du même gouffre que l'argument fret des pro-LGV

Rédaction

16/02/2012

La fermeture de la liaison fret Paris-Pays Basque de Novatrans porte aussi un coup de plus au fret ferroviaire, supposé être l'argument de poids des défenseurs d'une nouvelle ligne LGV au Pays Basque.

La Région d'Aquitaine a investi beaucoup dans Novatrans. Photo: EITB

La plateforme de transports combinés route-rail Novatrans, située à Mouguerre, a mis fin vendredi dernier à sa liaison de marchandises entre le Pays Basque et Paris, portant ainsi un coup de plus au fret ferroviaire, supposé être l'argument de poids des défenseurs d'une nouvelle ligne LGV au Pays Basque, dont la nécessité ne cesse concrètement de s'affaiblir.

Si, avant la crise de 2008, la plateforme Novatrans accueillait 35.000 containers par an, son déclin à 14.000 unités pour l'année 2011 traduisait tout autant les difficultés économiques de notre époque que l'inanité des politiques volontaristes de délester la route pour le rail, comme le Grenelle de l'Environnement l'avait pourtant proclamé.

L'axe Bordeaux-Espagne reste à ce jour un tunnel de poids lourds, et les mêmes pro-LGV (de la CCI de Bayonne à l'exécutif de la Région Aquitaine) n'apportent toujours pas la preuve d'une "saturation des lignes actuelles" par le fret ferroviaire, c'est un euphémisme.

Après des décennies de services, le président du syndicat routier O.T.R.E, Bernard Lataste, estime désormais que "on n'aura plus depuis Bayonne les moyens de mettre nos camions sur les trains," dans un reportage de France 3, "c'était la seule et unique opportunité", mais elle n'existe plus depuis vendredi dernier.

"La SNCF le déclare haut et fort que le fret ne l'intéresse plus," selon M. Lataste, qui dénonce des discours déconnectés et une propagande mensongère.

 

 

Le coeur du problème reside sans doute dans la dualité paradoxale de la SNCF : principal actionnaire de Novatrans, il est en aussi le premier concurrent, par sa filière de transports routier Geodis.

Installée depuis 2001 en Pays Basque nord, la société Novatrans avait pourtant bénéficié de nombreux avantages publics pour s'installer et prospérer sur le Centre de Fret Européen de Mouguerre

A cette période, le Conseil Régional d'Aquitaine intervenait fortement dans un investissement de 40 millions de francs (plus de 6 millions d'euros) pour que cette société spécialisée dans le report modal camion-train puisse "par anticipation" répondre parfaitement aux objectifs du Grenelle de l'Environnement, visant à retirer 20% des marchandises des routes pour les faire transiter par le rail.

En 2009, le groupe procédait malgré tout à un premier plan social touchant 30% de ses effectifs, tout en continuant de solliciter de nouvelles aides publiques, à hauteur de 1,4 million d'euros. Des aides que la Région d'Aquitaine apportera des subventions, sans toutefois réclamer des contre-parties en termes de sauvegarde des emplois, mais également en acceptant d'instruire les mêmes démandes formulées par l'opérateur privé Modhalor, désireux de construire une plateforme d'autoroute ferroviaire concurrente dans la même zone.

Aujourd'hui, le constat qui domine est celui de l'écoeurement et de l'incohérence entre la parole politique et la réalité de ses engagements.

Puisque la fermeture de la liaison fret Paris-Pays Basque risque logiquement d'entraîner un nouveau plan social pour les employés de Novatrans, il est sans doute temps également de s'interroger sur l'effondrement (moins assumé) de cette hypothèse d'un retour à la croissance qui saturerait les lignes existantes.

Avec les difficultés de Novatrans et la baisse constante du fret ferroviaire depuis 2006, l'argument pro-LGV du fret est transformé en partie de poker menteur dont le slogan, "LGV : transformons l'essai", proclamé "in vitro" jeudi dernier lors de la "manifestation pro-LGV" à la CCI de Bayonne, ne fait plus beaucoup sourire au Pays Basque nord.

 

Le CADE enjoint la CCI et les politiques pro-LGV à agir véritablement

Les pro-LGV réunis à la CCI de Bayonne jeudi dernier ont beau réaffirmer leur volonté de réduire le nombre de camions, "ils ont été les initiateurs de la non rentable autoroute A65 (avec, comme pour la LGV des taux de rentabilité garantis à l'exploitant avec l’argent des contribuables)", rappelle le CADE dans un communiqué diffusé ce jeudi. Le collectif souligne aussi que les difficultés de la société Novatrans "viennent les mettre au pied du mur".

Au cours de la dernière réunion de l'observatoire des trafics, le CADE a interpellé le sous-préfet sur cette question lui demandant d'agir avant les élections. "La CCI ayant déjà quitté la salle et le député Grenet n'y ayant jamais mis les pieds, seule RFF a émis des explications gênées et filandreuses", indique le CADE.

Prêt à se mobiliser pour sauver ce site qui capte effectivement des camions, le CADE enjoint "la CCI et les politiques qui ont paradé le 9 février à agir dès aujourd'hui".