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Collectivité territoriale

La Collectivité basque prend un nouvel envol avec le manifeste des 500

Frederik Verbeke

27/04/2013

Lors des États Généraux de la Collectivité territoriale Pays Basque, 500 acteurs du Pays Basque ont demandé à Paris d'entendre la "voix du Pays Basque".

États Généraux de Collectivité Territoriale Pays Basque

À travers un manifeste rendu public ce samedi 27 avril à Bayonne, 500 acteurs du Pays Basque, issus de tous les milieux, de toutes les sensibilités, repre´sentatifs de la diversite´ de ce territoire "Pays Basque", ont demandé au Gouvernement français et aux parlementaires de la République d'entendre la "voix du Pays Basque" en faveur d'une Collectivité territoriale à statut particulier.

Ces acteurs du Pays Basque, dont de nombreux élus repre´sentant la quasi-totalite´ des partis politiques, des chefs d'entreprises, des dirigeants d'institutions, des exploitants agricoles, des responsables associatifs, des artistes et des syndicalistes, se sont réunis sur le campus universitaire de Bayonne à l'occasion des États Généraux de la Collectivité territoriale Pays Basque, pour partager le projet, l'expliquer et le réaffirmer.

Dans le manifeste lu à l'issue des États Généraux, les signataires affirment que "le Pays Basque a un impe´rieux besoin de disposer d'une institution qui lui soit propre et qui incarne sa singularite´", une institution que le Pays Basque réclame depuis longtemps. La dynamique autour du Conseil des élus et du Conseil de développement "a atteint ses limites et, plus que jamais, le Pays Basque a besoin d'une gouvernance forte pour re´pondre aux risques de disparite´s entre inte´rieur et littoral et pour se doter des ressources indispensables afin de s'adapter a` toutes les mutations sociales, e´conomiques et e´cologiques, pour sauvegarder et de´velopper son patrimoine linguistique, culturel et naturel".

L'ensemble des acteurs re´unis ce samedi à Bayonne "demandent au Gouvernement, aux parlementaires de la Re´publique, d'entendre la "voix du Pays Basque", d'entendre la demande de ce territoire, d'e´tudier ses propositions et d'y re´pondre." "C'est maintenant qu'une solution doit e^tre trouve´e pour le Pays Basque!"

Manifeste des 500 pour la Collectivité territoriale Pays Basque

Le projet d'une Collectivité territoriale à statut particulier tel qu'il existe aujourd'hui est "un projet qui se veut et qui est extrêmement solidement construit. Il est le fruit d'une démarche longue, réfléchie (...), et il est porté par une volonté collective qui n'a jamais été aussi collective que ce qu'elle est aujourd'hui", a dit Jean-Pierre Massias, professeur de droit à l'UPPA qui a fourni, avec son collègue Jean Gourdou, son expertise juridique dans l'élaboration du projet.

"Le projet tel qu'il existe n'est certes encore pas achevé, il y a encore un certain nombre d'étapes à franchir et un certain nombre de difficultés à rencontrer," a-t-il reconnu, "mais gageons que la solidité de sa fabrication et le collectif de son soutien sont des signes et des facteurs de réussite".

Après la présentation des grands domaines d'actions prioritaires de la future Collectivité (le développement économique, l'agriculture, le tourisme, le transport, le logement, la culture, la langue basque, et la coopération transfrontalière), des représentants de la Coordination territoriale sont intervenus, montrant le large consensus qui s'est dégagé ces derniers temps autour du projet, appelant à étendre ce consensus et à continuer les mobilisations.

Des membres de la Coordination territoriale Pays Basque

"Il n'y a pas un territoire en France qui fait l'objet d'autant de réflexion pour arriver à la proposition d'aujourd'hui," a dit Jean-Jacques Lasserre, président du Conseil des élus du Pays Basque. "Je crois qu'il faut que nous avancions sur la prise de conscience du territoire. Le meilleur atout qui pourrait être le nôtre, et qui est déjà le nôtre, est de faire en sorte que la société de ce pays soit toujours de plus en plus convaincu de ce qu'elle recherche, de ce qu'elle demande et des formules qu'elle propose", a-t-il ajouté. "Il faut que nous rendions les citoyens de ce territoire beaucoup plus maîtres et responsables de leur destin".

Constatant le long chemin parcouru par le projet de la Collectivité, Jean-Baptiste Etcheto, président du Conseil de développement, a souligné qu'"il est extraordinaire d'observer que jamais en vingt ans le souffle n'est retombé. Par la force et le ciment du dispositif Conseil des élus/Conseil de développement, les acteurs majeurs du Pays Basque (...) ont su, au-delà de leurs différences, voir plus loin pour agir au plus près", a-t-il dit.

Néanmoins, la situation aujourd'hui apparaît "extrêmement fragile et d'une certaine manière doublement paradoxale", a estimé M. Etcheto. "Premier paradoxe: la formidable dynamique territoriale qui nous porte depuis vingt ans, qui a permis des réalisations aussi innovantes qu'efficaces, cette dynamique risque de s'asphyxier de ses propres succès, de sa maturité reconnue, par manque de moyens institutionnels adaptés aujourd'hui".

Le deuxième paradoxe, "particulièrement grave également", c'est qu'"à l'heure où s'impose la nécessité de franchir un cap dans la gouvernance locale, les moyens minimalistes [le Conseil des élus, le Conseil de développement, ndlr] que nous connaissons n'ont même pas de garanties d'avenir; notre dispositif est menacé, car rien ne nous certifie aujourd'hui que les financements des équipes techniques, de nos moyens d'animation, de nos moyens d'expertise, de nos moyens de concertation seront reconduits au-delà du 31 décembre 2013. Nous n'avons absolument aucune garantie".

Malgré tout, Jean-Baptiste Etcheto garde l'espoir : "Heureusement nous ne sommes pas dans une impasse," a-t-il dit, "la conjonction de nos travaux sur l'intérêt démontré d'une Collectivité territoriale Pays Basque, conjuguée à la volonté affichée du gouvernement de décentraliser l'action publique au plus près des citoyens, doit nous permettre naturellement, légitimement, de franchir ce nouveau cap dans une sérénité républicaine revendiquée et assumée, en d'autres termes, l'Etat a la volonté, nous avons la solution... Comment ne pas s'entendre?"

Martine Bisauta, porte-parole de Batera

Pour la sénatrice basco-béarnaise Frédérique Espagnac (PS), "la collectivité territoriale pays basque est la reconnaissance de l'histoire d'un peuple, la reconnaissance d'une identité, la reconnaissance d'une culture, la reconnaissance d'une langue". Soulignant le large consensus autour du projet, elle estime que "pour la première fois, le Pays Basque a de bonnes leçons à donner aux autres territoires (...). C'est la seule fois en France que sont réunies toutes les strates institutionnelles et que tous les élus ensemble décident, travaillent sur un projet de territoire."

"Est-ce qu'aujourd'hui sera actée la Collectivité territoriale? Je crois qu'il ne faut pas se leurrer, (...) les miracles n'arriveront pas demain," a-t-elle averti. Or, la collectivité territoriale spécifique, "elle est possible, elle prendra du temps, mais je crois réellement aujourd'hui que le premier acte on peut le poser avec un résultat réel," a-t-elle ajouté, en appelant à la mobilisation et au consensus.

"Il est indispensable de continuer à se mobiliser. Il reste encore trois mois, des choses sont possibles (...), mais s'il n'y a pas de consensus on n'y arrivera pas...," a-t-elle averti, tout en ajoutant que le débat sur l'acte III de la décentralisation "pourrait être retardé". Et de conclure : "Le cadre de la Collectivité vraisemblablement ne sera pas celui que vous attendez. À nous d'avancer ensemble, de construire l'étape charnière qui nous permettra ici quelque temps d'y arriver."

Pour Martine Bisauta, porte-parole de Batera, la collectivité territoriale Pays Basque est possible juridiquement et peut prendre son envol si Paris donne son feu vert politique. D'où son "vibrant appel à la mobilisation". "Nous avons 30 jours pour convaincre" tous les citoyens du Pays Basque à défiler le 1er juin dans les rues de Bayonne lors d'une manifestation "monstre et exceptionnelle".

"Le compte-à-rebours a commencé pour une mobilisation exceptionnelle à Bayonne," a-t-elle dit. Et d'ajouter, "la Collectivité, nous la voulons, nous l'aurons, c'est maintenant!". Ou comme disait le président de la Chambre de Commerce et de l'Industrie (CCI) de Bayonne, André Garreta, en basque : "Lurralde Kolektibitate bat orain!" (Une collectivité territoriale maintenant!).