Langue basque
L'enseignement des langues "régionales" examiné au Sénat
Frederik Verbeke
21/05/2013
Plusieurs amendements relatifs à l'enseignement des langues "régionales" sont examinés au Sénat à partir de ce mardi dans le cadre du débat sur le projet de loi pour la refondation de l'École.
Après son adoption par l'Assemblée nationale le 20 mars dernier, le projet de loi pour la refondation de l'École est examiné à partir de ce mardi 21 mai et jusqu'au vendredi 24 mai, si nécessaire, au Sénat, en séance publique. Plusieurs amendements concernant les langues "régionales" seront débattus. L'amendement concernant le financement des ikastola, par contre, a été déclaré irrecevable.
La commission de la culture du Sénat a adopté la semaine dernière 130 amendements. Bien que la présence des langues "régionales" reste très faible, elle a rectifié l'article 27 bis qui avait été introduit par les députés en première lecture et qui imposait des conditions plus restrictives que celles issues de la loi Deixonne de 1951. La commission a supprimé l'accord parental préalable et élargi la possibilité de recourir aux langues "régionales" aux enseignants du second degré. En plus, l'article ne limite plus la possibilité de recourir aux langues "régionales" à la seule fin d'améliorer l'apprentissage du français, mais l'ouvre à tout enseignement.
Le nouvel article 27 bis indique désormais : "sans préjudice des dispositions de l'article L. 121-3, les enseignants du premier et du second degrés sont autorisés à recourir aux langues régionales, dès lors qu'ils en tirent profit pour leur enseignement". Les deux autres références aux langues "régionales" dans le projet de loi sur la refondation de l'École ont été maintenues sans modification.
>> Lire : Langues "régionales" : la Commission culture du Sénat rectifie
(Le sénat. Photo: EFE)
AMENDEMENTS RELATIFS AUX LANGUES "RÉGIONALES"
De nombreux amendements relatifs aux langues "régionales" seront examinés par les sénateurs. Un amendement présenté par des sénateurs PS, dont Frédérique Espagnac et Georges Labazée, propose de compléter l'article 27 bis par une phrase ainsi rédigée: "Ils peuvent également s'appuyer sur des éléments de la culture régionale pour favoriser l'acquisition du socle commun de connaissances, de compétences et de culture et des programmes scolaires".
Les mêmes sénateurs ont déposé aussi un amendement détaillant les différentes formes que peut revêtir l'enseignement de et en langues "régionales" et inscrivant tout particulièrement dans la loi l'enseignement bilingue.
Ces sénateurs ont également présenté un amendement pour que les élèves résidant dans une commune dont les écoles ne proposent pas un enseignement de langue "régionale" puissent être inscrits dans une école d'une autre commune.
La sénatrice basco-béarnaise Frédérique Espagnac a présenté de nombreux amendements concernant l'enseignement des langues "régionales". Dans le cas de l'article 27 bis, elle veut aller bien plus loin, en proposant un amendement qui vise à insérer dans le code de l'éducation une section intitulée "L'enseignement des langues régionales" qui détermine les différentes formes de l'enseignement des langues "régionales" et précise les règles de protection et de promotion de l'enseignement de ces langues "tout au long de la scolarité".
Frédérique Espagnac propose, dans un autre amendement, à créer un nouveau cas dérogatoire à l'obligation de participation financière d'une commune à la scolarisation d'enfants résidant sur son territoire lorsque leur inscription dans une autre commune est justifiée par des motifs tirés de contraintes liées à l'inscription dans un établissement scolaire public proposant un enseignement de la langue régionale.
Frédérique Espagnac demande aussi de compléter le I de l'article L. 121-3 du code de l'Éducation - "la maîtrise de la langue française et la connaissance de deux autres langues font partie des objectifs fondamentaux de l'enseignement" - par les mots: ", sans préjudice de l'enseignement de et en langue régionale". Selon la sénatrice basco-béarnaise, "les langues régionales ne se substituent pas à l'apprentissages des langues étrangères, bien au contraire".
Dans le même sens, elle propose de compléter l'article L-312-10 du code de l'Éducation par l'alinéa suivant: "Dans les établissements et filières pratiquant la parité horaire ou l'enseignement immersif en langue régionale, une troisième langue vivante peut être introduite dès la maternelle selon les modalités spécifiques dites de l'enseignement intégré des langues."
Frédérique Espagnac a également présenté un amendement visant à autoriser le dépassement de la parité horaire dans les écoles et établissements bilingues publics ou privés. Elle propose que "les établissements et écoles bilingues français-langue régionale peuvent utiliser des méthodes pédagogiques d'enseignement en langue régionale dépassant le cadre de la parité horaire, sous réserve de garantir la pleine maîtrise de la langue française". Selon la sénatrice, "l'objectif qu'il est légitime de rechercher n'est pas dans une égalité des temps d'enseignement dans les deux langues mais dans l'égalité des compétences atteintes au terme de ces enseignements".
Un autre amendement, toujours de Frédérique Espagnac, cherche à accorder plus de place à l'histoire et aux cultures locales dans l'enseignement.
Le sénateur centriste des Pyrénées-Atlantiques Jean-Jacques Lasserre, de son côté, propose dans son amendement de rédiger l'article 27 bis de la façon suivante : "Dans les territoires où les langues régionales sont en usage, leur apprentissage, pour les familles qui le souhaitent, est favorisé. Dans ces cas-ci, les professeurs peuvent recourir aux langues régionales au cours de leur enseignement".
Il reste à voir combien d'amendements passeront...
>> Consulter le dossier législatif du projet de loi pour la refondation de l'école de la République (Sénat)
(Le collège Xalbador de Cambo. Photo: EITB)
L'AMENDEMENT CONCERNANT LE FINANCEMENT DES IKASTOLA DÉCLARÉ IRRECEVABLE
L'amendement concernant le financement des ikastola que Jean-Jacques Lasserre avait déposé au Sénat dans le cadre du projet de loi pour la refondation de l'École a été déclaré irrecevable par la commission des finances du Sénat.
Jean-Jacques Lasserre avait proposé de compléter l'alinéa 2 de l'article 18 bis par la phrase suivante: "Les collectivités territoriales qui le souhaitent pourront librement apporter leur soutien aux écoles associatives et laïques bilingues ou pratiquant l'enseignement par immersion." Un tel amendement aurait permis aux pouvoirs publics de financer les ikastola du Pays Basque sans craindre la loi Falloux qui interdit depuis 1850 à l'État (et par extension aux collectivités locales) ce genre de financements.
En janvier, le sous-préfet avait évoqué cette législation pour indiquer au maire d'Hendaye que la municipalité "ne saurait prendre en charge aucune dépense d'investissement destinée à la mise à disposition d'une Ikastola". Une telle interdiction n'empêcherait pas seulement le projet d'agrandissement de l'ikastola d'Hendaye, maismenacerait aussi les autres ikastola, dont quasiment la totalité reçoivent des subventions d'investissement.
>> Lire : Hendaye : Le conseil municipal vote en faveur de la nouvelle ikastola