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Proposition de loi

Les langues ''régionales'' examinées au Sénat fin juin

Frederik Verbeke

10/06/2011

La décision sur les langues "régionales" rendue récemment par le Conseil constitutionnel risque de peser lourdement sur le débat qui aura lieu le 30 juin au Sénat.

Le sort des langues ''''régionales'''' (basque, corse, occitan, breton, catalan, alsacien, etc.) sera de nouveau examiné au Sénat fin juin. Or, la décision sur les langues "régionales" rendue récemment par le Conseil constitutionnel risque de peser lourdement sur le débat.

Le jeudi 30 juin, les sénateurs vont se pencher en séance publique sur une proposition de loi relative au développement des langues et cultures "régionales". Il s''agit de la proposition de loi déposée au mois de janvier par Robert Navarro, sénateur PS de l''Hérault, et plusieurs de ses collègues.

Issu des travaux d''adaptation menés par les sénateurs du groupe sur une proposition de loi relative aux langues et cultures régionales faite par Armand Jung à l''Assemblée nationale, ce texte a tenu compte de l''ensemble des remarques exprimées par les sénateurs non signataires de la première proposition de loi.

L''objectif de cette proposition de loi rectifiée est de "mettre un terme à l''hypocrisie frappant nos langues et cultures régionales", estiment les signataires.

Si la France protège bien son patrimoine historique et artistique, pourquoi elle ne porterait pas la même attention à son patrimoine linguistique ainsi qu''à sa diversité culturelle?, se demandent les signataires de la proposition de loi. Jusqu''à présent, la France a été souvent dénoncée par le Conseil de l''Europe et les Nations Unies pour son manque de volonté à conférer aux langues "régionales" un cadre juridique protecteur. "Un tel statut est, à nos yeux, nécessaire," réclament les signataires.

Certes, depuis 2008, les langues "régionales" "appartiennent au patrimoine de la France", selon l''article 75-1 de la Constitution française. Or, le Conseil Constitutionnel estime, selon une décision rendue le 20 mai dernier, que cet article "n''institue pas un droit ou une liberté que la Constitution garantit". Pour le Conseil Constitutionnel, les langues "régionales" et leur enseignement ne relèvement pas d''un droit fondamental.

L''ombre de l''inconstitutionnalité plane sur le débat

Cette décision risque de renforcer la position de ceux qui s''opposent à la proposition de loi et donc d''empêcher de doter la France d''un cadre juridique propice au développement et à l''épanouissement des langues et cultures régionales. Il suffit de consulter le compte rendu de la dernière réunion de la commission de la culture, de l''éducation et de la communication du 1er juin pour se rendre compte à quoi pourrait aboutir le débat.

Lors de cette réunion, Xavier North, délégué général à la langue française et aux langues de France du Ministère de la culture, a été auditionné. Si M. North s''était déjà montré réticent à l''égard d''un statut juridique pour les langues "régionales" lors d''un colloque organisé à Bayonne en 2009, cette fois-ci il s''appuie tout de suite sur la décision du Conseil constitutionnel pour manifester ses réticences.

La proposition de loi "doit être considérée (...) à la lumière de la décision rendue le 20 mai par le Conseil constitutionnel," a-t-il estimé. "En rendant cette décision (...), le Conseil est fidèle à une jurisprudence constante (...) pour refuser de reconnaître des droits spécifiques à certaines catégories de citoyens, qui plus est sur des territoires déterminés".

"Si l''on s''en tient à la décision du Conseil, il n''y a pas dans notre pays de droit à d''autres langues qu''au français," a souligné M. North, avant d''avertir qu "il n''est pas déraisonnable de penser que tout ce qui pourrait s''apparenter", dans la proposition de loi, "à des obligations pour l''État ou les collectivités locales, et symétriquement à la reconnaissance d''un droit aux langues régionales, court un risque d''inconstitutionnalité".

La proposition de loi pourrait donc subir le même sort que la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires que la France a refusé de ratifier pour cause d''inconstitutionnalité, a tenu à alerter M. North.